Couleurs chaudes et couleurs froides, blancs chauds et blancs froids, quel lien peut-il exister entre la couleur et la température ? Avant de répondre à cette question, portons notre attention sur les étoiles : les plus chaudes émettent une lumière bleutée alors que les moins chaudes apparaissent rougeâtres (Fig. 1).

N’est-ce pas en contradiction avec la notion intuitive de couleurs chaudes et de couleurs froides ? En effet, il paraît naturel de qualifier le rouge (et l’orange) de couleurs chaudes et de dire que le bleu est une couleur froide Cependant, « dans l’absolu, il n’existe évidemment pas de couleurs chaudes et de couleurs froides. C’est là une pure affaire de conventions, lesquelles varient dans le temps et l’espace », écrit l’historien Michel Pastoureau1 qui précise même qu’en Europe, au Moyen Âge et à la Renaissance, le bleu était considéré comme une couleur chaude. Ce n’est qu’au XIXe siècle qu’on lui a attribué le caractère de couleur froide.
La température de couleur : un concept physique
Les qualifications de couleurs chaudes et de couleurs froides sont purement subjectives, ce qui n’empêche pas d’utiliser le concept de température de couleur dans le domaine de l’éclairage. Comment cette dernière est-elle définie ? Au-delà de l’exemple cité en début de texte, il existe d’une façon générale une relation entre la température d’un corps incandescent et la sensation colorée qu’il procure (voir figure 2) quelle que soit la nature de ce dernier : rouge vers 700 °C, jaune-orangé vers 1500 °C, blanc à partir de 2000 °C avec toutefois des nuances selon la température : le blanc tire sur le jaune vers 2400 °C, et devient de plus en plus bleuté au-delà de 6 000 °C environ.2,3 Entre ces deux nuances se situe la lumière blanche du Soleil dont la température de surface est de 5 500 °C

Pour caractériser précisément l’émission des objets incandescents, les physiciens ont défini un corps de référence qu’ils ont baptisé corps noir. : c’est un corps idéal capable d’absorber intégralement toutes les radiations électromagnétiques, quelles que soient leurs longueurs d’onde. À température ordinaire, il apparaît donc noir. Lorsqu’il est chauffé, il émet un rayonnement dont le spectre (c’est-à-dire la variation de l’intensité lumineuse en fonction de la longueur d’onde), qui est une courbe en cloche, dépend exclusivement de la température. Quand la température augmente, l’intensité croît et le maximum d’émission se déplace vers les courtes longueurs d’onde, d’où un changement de couleur. Il est alors possible de définir la température de couleur d’une source lumineuse de la façon suivante : c’est la température du corps noir dont le rayonnement a la même couleur (plus précisément la même chromaticité4) que celle de la source considérée. Elle est exprimée en kelvins (K)5.
Blanc chaud, blanc neutre, blanc froid : faites votre choix !
Lorsqu’on achète une lampe, le choix ne manque pas : lampes à halogène, lampes fluo-compactes, lampes à LED en tous genres. Ayez l’œil et regardez bien l’emballage pour évaluer la blancheur de l’éclairage produit. Vous trouverez indiquées la puissance mais aussi la température de couleur qui renseigne sur la nuance du blanc produit : 2 200-3 000 K pour les blancs chauds, 3 000-4 000 K pour les blancs neutres, et au-delà de 5 000 K pour les blancs froids (Fig. 3).

Dans le cas des lampes à incandescence classiques (retirées de la vente) ou à halogène, la température de couleur est proche de celle du filament et le spectre d’émission est voisin de celui du corps noir à la même température. En revanche, les lampes fluo-compactes et les lampes à LED blanches émettent de la lumière, non pas par incandescence, mais par le phénomène de luminescence3. Dans ce cas, la température de couleur n’a aucun rapport avec la température de la substance émettrice et la forme du spectre d’émission est très différente de celle d’un corps noir. On parle alors de température de couleur proximale : c’est la température du corps noir dont le rayonnement possède la chromaticité la plus voisine de celle de la source considérée.
Un blanc dit « chaud » tire sur le jaune et crée une ambiance « chaleureuse » pour l’éclairage intérieur, alors qu’un blanc dit « froid », lui, tire sur le bleu et convient plutôt aux locaux techniques ou pour l’éclairage extérieur. Comme pour les couleurs chaudes et froides évoquées au début de ce texte, vous noterez le caractère subjectif de ces qualificatifs de « chaud » et de « froid » : la température de couleur d’un blanc chaud est en effet inférieure à celle d’un blanc froid ! Paradoxal, n’est-ce pas ?
Références et notes
1M. Pastoureau, Dictionnaire des couleurs de notre temps. Symbolique et société, Éditions Christine Bonneton (2007).
2 B. Valeur, La couleur dans tous ses éclats, Belin (2011).
3 B. Valeur, Lumière et luminescence – Ces phénomènes lumineux qui nous entourent, Belin (2005, 2eéd. 2017).
4La chromaticité est définie par un couple de grandeurs caractérisant un stimulus de couleur, en général la teinte et la saturation, indépendamment de la clarté (ou de la luminance).
5Il faut ajouter 273,15 à la température en degrés Celsius pour obtenir la valeur en kelvins.
Bonsoir, c’est toujours un plaisir de vous lire. J’attends avec impatience votre prochain billet.
J’aimeJ’aime